Trois choix pour le rôle de l’Amérique dans le monde

Revue du livre de Ian Bremmer

Envoyée par: Mauldin Economics

Date de publication: 20 mai 2015

La façon de voir des Américains a bien changé depuis les mauvais jours de l’Administration Bush [fils] lorsque le président comptait transformer le Moyen-Orient en démocraties alliées.

 5Le livre de Ian Bremmer offre un choix aux électeurs   lassés des attaques politiques qui ne cherchent qu’à mettre des bâtons dans les roues de l’opposition sans prendre en compte les intérêts des Américains. Le monde a changé. De puissants alliées tel que l’Angleterre, l’Allemagne, le Japon et la Corée du Sud, s’intéressent toujours aux États Unis, mais ils ont besoin de relations plus étendues avec la Chine pour que leurs économies se développent et pour créer de l’emploi. Ils ont la confiance et l’assurance qui leurs permettent de refuser de suivre Washington. Les États-Unis demeurent la seule nation surpuissante capable de projeter sa puissance militaire partout dans le monde.

Les Américains réclament plus d’implication chez eux et moins au-dehors. Les guerres en Irak et en Afghanistan ont laissé la population hésitante quant aux conflits qui exigent une participation à long terme des troupes américaines.

 Les élections américaines de 2016 sont dans tous les esprits alors que la campagne approche. On découvre une floraison de candidats républicains et conservateurs sur la droite, mais une seule candidate libérale à gauche. À écouter les candidats de droite, ils ne semblent pas se rendre compte du changement.

333555

« Si nous nous retirons de la défense de la liberté partout dans le monde, le conflit arrivera éventuellement chez nous », Jed Bush

« Les nations vulnérables dépendent toujours de l’Amérique pour décourager l’agression par leurs plus grands voisins », Marco Rubio.

Tous énumèrent leurs priorités, mais évitent de mentionner le coût et les risques à prendre.

0

 Ils parlent comme si la politique étrangère dépendait principalement sur la foi en la grandeur du pays et la volonté d’utiliser la puissance américaine, avec à peine un clin d’œil vers ce que recherche le public américain.

Président Bush [le père] s’est rendu compte que débarrasser Bagdad de Saddam demanderait un coût et des risques plus élevés que l’opération au Koweït, et il n’y toucha pas. Son fils sera moins prudent.

 Ian Bremmer a appelé son livre Superpower: Three Choices For America’s Role In The World [Superpuissance: trois choix pour le rôle de l’Amérique dans le monde] parce que, dit-il, en dépit des défis auxquels la politique étrangère américaine doit faire face, l’Amérique est le seul pays avec le muscle politique, économique et militaire de persuader les gouvernements de toutes les régions du monde à prendre des mesures qu’ils ne prendraient pas autrement. C’est bien là une définition de travail pour la projection du pouvoir mondial. Au cours de la prochaine décennie, la taille impérieuse de l’économie chinoise va probablement dépasser celle de l’Amérique, mais militairement, technologiquement, diplomatiquement, et culturellement, la Chine ne peut pas rivaliser avec les Américains et aucun autre pays ne s’en rapproche.

Mais la plupart des Américains ne veulent pas que leur gouvernement au pouvoir projette son pouvoir comme il l’a fait au cours des dernières décennies. Une étiquette de $3 milliers de milliards [3 000 000 000 000] pour les guerres et les occupations mal conçues en Irak et en Afghanistan n’a pas aidé.

 99Les révolutions dans l’énergie et la production alimentaire facilitent à la fois la dépendance des États-Unis sur les importations et la nécessité pour Washington de se lier en partenariats avec des pays potentiellement instables dans les régions instables du monde. Un effondrement de la classe moyenne américaine a contribué à convaincre un contingent croissant d’Américains que leur pays ne bénéficie pas de la mondialisation. De nouveaux outils de la diplomatie coercitive – cybersurveillance et attaques, les drones, et la militarisation de la finance – soulagent la dépendance américaine en s’appuyant sur des partenariats et des alliances. Les alliés des États-Unis sont en train de perdre du poids dans leurs régions respectives, et leurs gouvernements sont préoccupés par les défis nationaux. L’Amérique a moins besoin de l’Europe, et la majorité de ses pays partagent ce sentiment sur l’Amérique. La relation transatlantique, le fondement de l’ordre d’après-guerre, est plus faible qu’à tout autre moment au cours des décennies.

 L’Amérique fait donc face à une crise d’identité. Les Américains, les électeurs autant que les dirigeants savent ce qu’ils ne veulent pas: ils ne veulent pas que l’Amérique joue le rôle de gendarme du monde; ils ne veulent pas essayer de reconstruire le Moyen-Orient; ils ne veulent pas sacrifier troupes et argent des contribuables pour rendre le monde plus sûr pour la démocratie. Mais alors que veulent-ils ? Que représente l’Amérique ? Quel est le but de toute cette superpuissance? Les Américains ne savent pas. Les Alliés et les ennemis des États-Unis ne le savent pas non plus. C’est devenu le plus grand point d’interrogation géopolitique du monde.

Arrivent les candidats.

666

 Alors que l’élection présidentielle 2016 prend forme, la politique étrangère est rentrée dans la conversation nationale. L’économie américaine est en pleine croissance, mettant à l’écart une question politique centrale. La plupart des Américains sont fatigués des luttes partisanes au corps à corps sur les soins de santé. La cote de popularité du président Obama sur la politique étrangère est au plus faible. Hillary Clinton, la considérable favorite pour l’investiture démocrate, est l’ancienne secrétaire d’État d’Obama. Pour ces deux raisons, les républicains voient en la politique étrangère d’Obama un objectif politique prometteur. Les candidats républicains de Jeb Bush à Marco Rubio, et de Chris Christie à Rand Paul s’alignent pour prendre leur tour sur le terrain.

Mais l’absence d’une stratégie cohérente de la politique étrangère des États-Unis n’a pas commencé avec Barack Obama, quoique ses luttes du second terme aient rendu le problème plus douloureusement évident. Depuis la chute du mur et l’effondrement soviétique, les présidents américains des deux partis ont défini la mission de l’Amérique en terme de tactiques. Depuis 25 ans, la politique étrangère des États-Unis a été réactive et improvisée. Et il n’est plus possible d’identifier une approche démocratique ou républicaine de la politique étrangère. Il y a maintenant des faucons, des colombes, et des défenseurs des libertés civiles dans les deux partis. Ceux qui espéraient justifier leurs propres préférences politiques en se repliant sur la loyauté au parti ont à réfléchir.

En bref, il est grand temps de reconsidérer le rôle de l’Amérique dans le monde. Dans le livre «Superpuissance», l’auteur propose trois alternatives radicalement différentes. Et bien que Bremmer ait une préférence, qu’il défend dans la conclusion, il croit que chacune des options est envisageable. Ce qui n’est pas envisageable c’est de continuer de gaffer en réagissant sans avoir une stratégie. C’est la quatrième option, et elle est de loin la plus mauvaise.

Il est insensé de penser que la seule superpuissance au monde puisse n’avoir qu’une seule voie bien réfléchie vers l’avenir. Bremmer a imaginé une conjoncture aussi solide que possible pour chacune des trois alternatives dans le but de défier le lecteur à choisir, et il espère que ce livre aidera à préparer le terrain pour un débat sérieux et constructif parmi les candidats en 2016.

Voici les trois choix. Chaque option a son propre chapitre dans le livre:

L’Amérique Indispensable

Cette alternative sera la plus familière aux lecteurs. Nous vivons dans un monde profondément interconnecté. Non, l’Amérique ne devrait pas jouer le gendarme du monde, mais si l’Amérique ne conduit pas, personne d’autre ne le fera. Des incendies internationaux brûleraient hors de contrôle. Plus d’États du Moyen-Orient échoueraient, et le terrorisme se métastaserait. Le révisionnisme russe menacerait l’Europe et bien au-delà. La Chine userait de son influence économique croissante pour étendre son influence politique, sapant les structures et les normes créées par les démocraties industrielles avancées pour renforcer la liberté individuelle et le libre marché du capitalisme.

44 Les valeurs, qui ont bénéficié à la fois aux nations développées et celles en développement, seront de plus en plus sous la menace. Les États-Unis doivent activement défendre et promouvoir ces valeurs. Cela signifie l’utilisation de tous les outils disponibles à la puissance américaine pour renforcer les alliances avec des partenaires compétents et partageant les mêmes idées. Il convient de renforcer les institutions internationales affaiblies. Cela signifie que dans notre monde interconnecté, l’Amérique doit développer et maintenir une stratégie de politique étrangère cohérente et globale.

Nous ne devons pas avoir l’illusion qu’une Amérique indispensable livrera des victoires rapides et faciles, que ses ennemis vont reculer devant la détermination américaine, ou que les alliés de longue date suivront toujours l’exemple de l’Amérique. Washington ne peut pas renverser tous les tyrans.

Mais tout cela est une raison de plus de prendre position. Il ne suffit pas de porter atteinte à la Syrie d’Assad, l’Amérique doit contribuer à ce que les citoyens de la Syrie construisent un pays stable et prospère. Il faut répondre à l’agression russe et soutenir la souveraineté de l’Ukraine à veiller à ce que le Kremlin ne s’imagine pas qu’il peut bousculer les alliés de l’OTAN. L’Amérique devra soutenir les alliés traditionnels du Moyen-Orient, Israël et les pays du Golfe et ne pas faire d’accord avec l’Iran qui dépende de l’honnêteté et la bonne volonté de ses dirigeants. L’Amérique devra s’impliquer avec la Chine, tout en contenant ses ambitions expansionnistes, y compris dans la mer de Chine du Sud. Et tout faire pour responsabiliser le peuple chinois pour créer une dynamique irrésistible pour un changement politique dans leur pays.

a2

S’il n’y a qu’une seule chose que les Américains auront apprise depuis 9/11, c’est que Washington ne peut se permettre d’ignorer les menaces émergentes dans des lieux éloignés. Le monde est devenu un endroit de plus en plus dangereux. Il y a un travail important à faire, et personne, pas même la seule superpuissance peut le faire seul. Mais un monde volatile a besoin de direction. Qui d’autre que l’Amérique peut-elle, en dépit de ses défauts, gouverner?

 

Moneyball Amérique [une Amérique basée sur Moneyball]

[Moneyball est fondé sur un livre de Michael Lewis, publié en 2003, sur la stratégie révolutionnaire employée par le directeur général de l’equipe de baseball de la ville d’Oakland en Californie: Billy Beane.

À sa base, Moneyball recherche l’efficacité. La stratégie est ancrée sur l’utilisation d’analyses afin de maximiser les actifs. La stratégie est basée sur la prise de décisions fondées sur des statistiques plutôt que sur l’intuition ou l’opinion populaire

2

Moneyball au gouvernement est une théorie cherchant à obtenir des résultats pour l’Amérique, à encourager les gouvernements à tous les niveaux à accroître leur utilisation des données au moment d’investir les fonds limités des contribuables.

Moneyball pour le gouvernement se définit comme suit :

  • Accumuler des preuves sur les pratiques, les politiques et les programmes qui permettront d’atteindre les résultats les plus efficients afin que les décideurs puissent prendre de meilleures décisions;
  • Investir les fonds limités des contribuables dans les pratiques, les politiques et les programmes qui utilisent des données, et l’évaluation de preuves pour démontrer que ceux-ci sont efficaces;
  • diriger les fonds loin des pratiques, des politiques et des programmes qui ne parviennent pas à obtenir des résultats mesurables.

1

Ian Bremmer a adapté l’idée de ce livre échafaudé sur cette stratégie de baseball qui balaye les anciennes règles et la sagesse conventionnelle pour se concentrer sur une gestion établie sur des résultats rationnelle.

Un champion d’une Amérique Moneyball [littéralement Ballon d’argent] serait moins intéressé par la promotion des valeurs de l’Amérique que par l’amélioration de la valeur de l’Amérique. Il ne gaspillerait pas de l’argent et des vies pour vendre des idées que les dirigeants de la Chine, la Russie et le Moyen-Orient sont facilement capables d’ignorer.

3

Comment obtenir de meilleurs résultats avec les fonds existants? Nous sommes à une époque où les compressions budgétaires sont devenues aveugles, ignorant l’impact quelles peuvent avoir. Comment le gouvernement peut-il donc prendre de meilleures décisions et obtenir de meilleurs résultats avec les ressources existantes? Comment arrêter de dépenser des dollars sur des programmes qui n’obtiennent pas de résultats? Il faut pour cela que le gouvernement joue au Moneyball!

Le pivot vers l’Asie, c’est-à-dire un véritable pivot, par lequel se tourner vers l’Asie veut dire se détourner de quelque chose d’autre – offre un excellent exemple de l’agile pensée de Moneyball.

a7

Créer des liens commerciaux et de sécurité au cœur de la région économiquement la plus dynamique du monde. Ne passer qu’un minimum de temps et de capital politique sur un plan de paix que ni les Israéliens ni les Palestiniens ne veulent, et équilibrer les liens traditionnels avec les Arabes du Golfe par une relation plus pragmatique avec l’Iran qui est un pays et un marché qui offre à l’Amérique de futures possibilités que d’autres pays dans la région ne peuvent offrir. Partager technologie et information avec des alliés, mais en leur laissant assumer une plus grande responsabilité pour leur propre sécurité. Ne jamais partir en guerre pour défendre un principe, mais là où le terrorisme menace directement la vie des Américains, se battre pour gagner.

Le monde devient plus difficile et plus concurrentiel. Raison de plus pour investir notre capital humain et matériel à bon escient. Avec une tête claire et un crayon pointu, Moneyball propose une voie à suivre dont tous les Américains pourront tirer profit.

L’Amérique indépendante

Les valeurs américaines n’ont d’importance que si les Américains les appliquent chez eux. Washington ne peut pas corrompre, intimider ou exercer un chantage sur la Chine (ou d’autres États autoritaires) pour qu’elle accepte la démocratie libérale de marché. Les Américains ne possèdent pas ce genre de pouvoir. Les Alliés et les ennemis des États-Unis le savent, et les deux misent sur un monde et une économie mondiale multipolaire et mieux équilibré. Nombreux sont les Américains qui acceptent aujourd’hui qu’une volonté plus forte, un aperçu plus profond, et des poches mieux remplies ne peuvent aider Washington à remodeler le monde comme elle le voudrait. Aucune nation, pas même la seule superpuissance, ne peut toujours obtenir ce qu’elle veut dans un monde où tant d’autres gouvernements peuvent ignorer la pression américaine.

22

Ceux qui prônent une Amérique indépendante reconnaissent que les défis mondiaux sont beaucoup plus dangereux et dommageables pour les autres pays qu’ils le sont pour l’Amérique. Le terrorisme est une menace bien plus grande pour le Moyen-Orient, pour l’Europe, et la Russie que pour les États-Unis. Le conflit en Ukraine a peu de portée sur la sécurité ou la prospérité en Amérique. L’instabilité dans les pays producteurs d’énergie est de moins en moins pertinente pour une Amérique plus riche en énergie qu’à aucun moment depuis les années 1960. L’expansion de la Chine importe beaucoup plus pour les voisins de la Chine

 Le chroniqueur sur les affaires étrangères pour le New York Times Ian Bremmer est président du Eurasia Group, un cabinet de conseil sur les risques en politiques.

Son livre Superpower: Three Choices For America’s Role In The World [Superpuissance: trois choix pour le rôle de l’Amérique dans le monde est publié par Portfolio / Penguin

La mission de Mauldin Economics est de porter à l’attention des abonnés des investissements spécifiques que son équipe découvre et qui permettent d’atteindre les objectifs d’investissement les plus pressants de notre époque; que ce soit dans le but d’augmenter les revenus d’investissement, de générer des gains en capital, ou de préserver la richesse dans des marchés turbulents.

banner 1

 

You may also like...

Leave a Reply